La dissimulation par des débiteurs de leur apport de biens immobiliers indivis à une société civile immobilière découvert par le liquidateur judiciaire, alors que leur requête en vue de l’ouverture d’une procédure de faillite civile de droit local aurait dû, en vertu de l’article R 631-1 du code de commerce, être accompagnée d’un inventaire sommaire des biens des débiteurs, le tout devant être signé et certifié sincère par ceux-ci, démontre l’absence de leur bonne foi nécessaire pour bénéficier de la procédure d’insolvabilité notoire.
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Cour d’appel de Colmar ct0007
Audience publique du mardi 16 septembre 2008
N° de RG: 08/01786
Texte intégral
REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
Copie exécutoire à
– Me Rosemarie BECKERS
Copie à M. le PG
Arrêt notifié aux parties
COUR D’APPEL DE COLMAR
PREMIERE CHAMBRE CIVILE – SECTION A
ARRET DU 16 Septembre 2008
Numéro d’inscription au répertoire général : 1 A 08/01786
Décision déférée à la Cour : 10 Mars 2008 par le TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE DE STRASBOURG
Demandeur et APPELANT :
Monsieur Dietmar Lorenz Y…
…
Représenté par Me Rosemarie BECKERS, avocat à la Cour
Avocat plaidant : Me BUEB Serge, avocat à STRASBOURG
COMPOSITION DE LA COUR :
L’affaire a été débattue le 16 Juin 2008, en chambre du conseil,
devant la Cour composée de :
M. HOFFBECK, Président de Chambre, entendu en son rapport
M. CUENOT, Conseiller
M. ALLARD, Conseiller
qui en ont délibéré.
Greffier, lors des débats : Mme Katia GRUSSENMEYER, ad hoc assermenté,
Ministère Public :
représenté lors des débats par Monsieur François JURDEY, avocat général, qui a fait connaître son avis et dont les réquisitions écrites ont été communiquées aux parties.
ARRET :
– Contradictoire
– prononcé en chambre du conseil par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du Nouveau Code de Procédure Civile.
– signé par M. Michel HOFFBECK, président et Mme Christiane MUNCH-SCHEBACHER, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire. Vu la déclaration d’insolvabilité notoire présentée par M. Dietmar Y… au Tribunal de Grande Instance de STRASBOURG le 30 novembre 2007.
Vu le jugement du 10 mars 2008 du Tribunal de Grande Instance de STRASBOURG, qui a refusé d’ouvrir une procédure collective, au motif que l’état d’insolvabilité notoire de M. Y… n’était pas clairement établi, et que sa bonne foi ne paraissait pas évidente ;
Vu l’appel relevé par M. Y… le 27 mars 2008 contre ce jugement qui ne lui a été notifié qu’ultérieurement ;
Vu ses conclusions d’appel déposées le 3 juin 2008, pour expliquer qu’il est régulièrement domicilié en FRANCE, qu’il travaille à temps partiel pour une société SOCALDEX, et qu’il est bien en état d’insolvabilité notoire, comme étant redevable d’une somme de 56.000 à l’égard d’une société ISA HOLDING, ainsi que du montant d’un redressement fiscal de 155.000 opéré en ALLEMAGNE au titre de son activité de Commissaire aux Comptes ;
Vu sa demande d’infirmation du jugement entrepris et d’ouverture d’une procédure de liquidation judiciaire immédiate au résultat des explications précédentes ;
Vu les conclusions du Ministère Public, qui propose de confirmer le jugement entrepris, au motif que la situation de M. Y… est peu claire, et que sa bonne foi est contestable ;
Attendu qu’il résulte des pièces fournies actuellement devant la Cour que M. Y… a pris une installation en FRANCE, à la fin de l’année 2005 selon ses indications, après avoir subi un redressement fiscal important en ALLEMAGNE au titre de son activité de Commissaire aux Comptes ;
Attendu que dans le cadre de la coopération fiscale européenne, le fisc allemand a fait notifier à M. Y… un rappel d’impôt sur le revenu de 155.727,50 , au titre des années 2005, 2006 et 2007 ;
Attendu qu’il faut observer que cette dette n’avait pas été déclarée en première instance, et qu’elle indique que M. Y… a continué de percevoir des revenus en ALLEMAGNE entre 2005 et 2007, ce qui est mal compatible avec sa déclaration d’une installation effective en FRANCE
à la fin de l’année 2005 ;
Attendu d’ailleurs que d’après les indications verbales fournies à cette Cour par M. Y…, celui-ci serait toujours inscrit à un ordre professionnel des Commissaires aux Comptes en ALLEMAGNE ;
Attendu qu’en première instance, M. Y… n’a déclaré qu’une dette de 56.000 , résultant d’une curieuse reconnaissance souscrite au profit d’une société ISA HOLDING, étrangement domiciliée à la même adresse que lui à WISSEMBOURG ;
Attendu que cette reconnaissance de dette paraît naturellement aussi douteuse à cette Cour qu’elle n’est apparue au premier juge ;
Attendu qu’il faut noter également que M. Y… n’a pas déclaré d’éléments d’actif alors qu’un garage d’HAGUENAU lui a signifié une injonction de payer une somme de 1.886 , ce qui paraît impliquer qu’il possède une automobile ;
Attendu que M. Y… n’a pas pu expliquer clairement la nature du travail effectué apparemment pour cette société SOCALDEX, qui le rémunère à mi-temps pour une somme de 600 ;
Qu’il prétend qu’il évalue un projet immobilier à KEHL, alors que d’une part, il n’est pas du tout de la compétence d’un comptable de procéder à des évaluations de travaux immobiliers, et que d’autre part, le projet serait abandonné à l’heure actuelle ;
Attendu qu’en définitive, il résulte assez clairement des éléments précédemment rappelés que M. Y… n’est pas de bonne foi, et qu’il n’a affecté de prendre un logement en FRANCE que pour les besoins d’une procédure collective, destinée à effacer un passif constitué essentiellement auprès du fisc allemand, sous réserve d’ailleurs qu’il n’existe pas d’autres dettes également non déclarées;
Attendu que M. Y… a déclaré une dette inexplicable contractée prétendument auprès d’une société ISA HOLDING, mais qu’il a tu en première instance le passif constitué en ALLEMAGNE ;
Qu’il prétend ne pas avoir d’actif en ALLEMAGNE, mais que cela n’est guère vraisemblable compte tenu de sa profession de Commissaire aux Comptes, qui lui a valu un rappel de 155.000 au titre de trois années fiscales ;
Attendu donc que M. Y… n’est pas de bonne foi, et qu’il n’a affecté de prendre un domicile apparent en FRANCE que pour les besoins d’une procédure de liquidation judiciaire de droit français, automatiquement extinctive des dettes, alors que les procédures en vigueur en ALLEMANGNE n’ont pas cet effet ;
Attendu qu’il convient par conséquent de confirmer le rejet de sa demande d’ouverture d’une procédure collective en FRANCE, laquelle ne remplit pas les conditions imposées par l’article L. 670-1 du Code de commerce ;
PAR CES MOTIFS :
LA COUR,
REÇOIT l’appel de M. Dietmar Y… contre le jugement du 10 mars 2008 du Tribunal de Grande Instance de STRASBOURG ;
Au fond, CONFIRME le jugement entrepris en toutes ses dispositions ;
CONDAMNE M. Dietmar Y… aux entiers dépens de première instance et d’appel.